Dans la Peau du Monstre : Quand le Jeu Vidéo Dépasse l’Humain

Le bon vieux temps du chevalier en armure étincelante, sauvant la princesse d’un dragon cracheur de feu, semble bien loin.

Si ce cliché a fondé les bases de l’héroïsme vidéoludique, les joueurs d’aujourd’hui sont en quête d’autre chose. Une quête insatiable de nouveauté, de profondeur et, surtout, de perspectives inédites.

Nous ne voulons plus seulement être le héros ; nous voulons comprendre le monde sous un autre angle, incarner l’inconnu, et parfois même, devenir le monstre. Plongeons dans cette tendance fascinante qui redéfinit les codes du jeu narratif et de l’immersion.

Imaginez un instant. Au lieu de brandir une épée, vous déployez des ailes membraneuses. Au lieu de lancer un sort de feu, vous le crachez depuis vos propres entrailles. Cette simple idée est au cœur de l’attrait pour les personnages non-humains. Il s’agit d’une rupture fondamentale avec notre réalité, un fantasme de puissance brute et d’instincts primaires bien plus viscéral que celui du simple soldat suréquipé.

Jouer un monstre, une créature ou un être fantastique, c’est avant tout une exploration. C’est découvrir des mécaniques de gameplay qui transcendent la condition humaine : voler, ramper, voir dans le noir, communiquer avec la nature ou semer la terreur. C’est aussi une exploration narrative. Comment une société perçoit-elle un être différent ? Un vampire dans le monde de Vampire: The Masquerade n’est pas qu’un humain avec des crocs ; c’est une créature de la nuit, luttant contre sa soif de sang (la « Bête ») tout en naviguant dans une société secrète aux règles impitoyables. Cette dualité offre une complexité morale que le rôle du « sauveur de l’humanité » peine parfois à atteindre. L’empathie se déplace : on ne combat plus le monstre, on est le monstre, et l’on se surprend à comprendre ses motivations.

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Cette tendance n’est pas née d’hier. Depuis des décennies, des jeux emblématiques nous permettent de quitter notre enveloppe humaine.

Dans la saga The Elder Scrolls, et plus particulièrement Skyrim, le choix de jouer un Khajiit félin ou un Argonien reptilien n’est pas qu’esthétique. Il influence les dialogues, la perception des PNJ et notre propre immersion dans un monde où le racisme et la méfiance sont palpables. Plus encore, la possibilité de devenir un Loup-Garou ou un Seigneur Vampire transforme radicalement le gameplay, nous offrant une puissance sauvage en échange d’une part de notre « humanité ».

De son côté, The Witcher nous place dans la peau de Geralt de Riv, un mutant. Bien qu’il ait une apparence humaine, il est constamment rejeté, craint et traité comme un monstre par ceux qu’il protège. Le jeu explore brillamment cette frontière floue : qui est le véritable monstre ? L’homme ou la bête ?

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Des titres comme Dark Souls poussent le bouchon encore plus loin, nous faisant incarner une « Morteflamme », une coquille vide dans un monde déchu peuplé de dieux déments et de créatures abominables. L’humanité y est une ressource, une lueur fragile que l’on cherche désespérément à préserver. Ces jeux ont popularisé les univers de dark fantasy où la morale est grise et où la monstruosité est souvent une question de point de vue.

Aujourd’hui, une nouvelle vague de jeux, souvent issus de la scène indépendante ou de concepts plus audacieux, embrasse pleinement cette idée. On ne se contente plus d’une transformation temporaire ou d’une race non-humaine dans un monde d’humains. Désormais, l’expérience monstrueuse est au centre de tout. Le gameplay, l’histoire et la progression sont entièrement bâtis autour de cette condition. Ces titres mélangent les genres, combinant la profondeur d’un RPG, la tension d’un jeu de survie et l’atmosphère envoûtante de la dark fantasy.

Le concept n’est plus seulement de « jouer » un monstre, mais de « devenir » un monstre. La progression n’est plus une simple montée de niveau, mais une véritable métamorphose. On commence souvent en bas de la chaîne alimentaire, faible et vulnérable, pour évoluer, muter, et débloquer des capacités terrifiantes. Cette soif de pouvoir et d’évolution est un moteur de jeu extrêmement puissant. C’est précisément le genre d’expérience que des récits comme reborn as a monster 2: rise of the beast god cherchent à explorer, où toute la prémisse repose sur l’ascension d’une créature de bas étage vers un statut d’entité quasi-divine, redéfinissant les règles de son propre monde. Ces expériences narratives nous placent face à des choix qui ne sont plus humains : faut-il dévorer ses ennemis pour gagner en puissance ? Faut-il asservir des races inférieures pour bâtir un empire ? C’est une liberté grisante et moralement complexe.

Pourquoi cette niche est-elle appelée à grandir ? D’abord, parce que les joueurs sont matures. Après des décennies de schémas narratifs similaires, le public est prêt pour des histoires plus sombres, plus ambiguës et plus audacieuses. Ensuite, les technologies actuelles permettent de créer des mondes et des créatures plus crédibles que jamais. Animer un dragon de manière convaincante ou concevoir un écosystème alien cohérent est désormais à la portée de nombreux studios.

Surtout, cette tendance répond à un désir fondamental du jeu vidéo : l’évasion. Et quelle meilleure évasion que de se défaire complètement de notre propre forme pour en adopter une autre, radicalement différente ? Incarner un monstre, c’est le pouvoir de réécrire les règles, de voir le monde non pas comme un humain qui le subit, mais comme une force de la nature qui le façonne.

Le héros humain aura toujours sa place, mais la porte est désormais grande ouverte sur des univers où il n’est qu’un élément parmi d’autres, et souvent pas le plus puissant. De Carrion, où l’on incarne une masse de tentacules, à des concepts plus profonds explorant la psyché d’êtres anciens, le jeu vidéo prouve qu’il est le média parfait pour explorer l’altérité.

Alors, la prochaine fois que vous lancerez un jeu, n’hésitez pas. Laissez de côté l’armure et l’épée. Choisissez les griffes, les crocs, ou les ailes. Osez franchir le miroir et voir ce qui se cache de l’autre côté. Car c’est souvent dans la peau du monstre que l’on découvre les expériences les plus profondément humaines.

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